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Inondation au Mali : Des solutions innovantes pour limiter les causes
lundi 26 août 2024, par
Le Mali, pays sahélien, fait face aux risques du changement climatique depuis des années, précisément à Bamako, en cette période pluvieuse où les risques d’inondations sont fréquents. Cela est dû à des fortes pluies, aux caniveaux très étroits, aux mauvais états des maisons bâties dans le lit de marigot, etc. Au regard de tous ces constats, des solutions innovantes s’imposent. Lisez !
Composé de 6 communes et 66 quartiers, situés en plein cœur de la zone sahélienne d’Afrique de l’Ouest, le district de Bamako, capital du Mali sur 375 km2 dans la cuvette du fleuve Niger, le relief est assez marqué, alternant une zone de plateaux relativement monotone aux alentours du fleuve et des collines entourant la ville.

La morphologie de la ville est caractérisée par une succession de zones dépressionnaires, de petits marigots et de hauts reliefs localisés principalement au nord et à l’est et devant constituer en temps normal des obstacles à l’extension infinie.
L’agglomération de Bamako présente des sols principalement latéritiques empêchant l’infiltration et argilo-limoneux sablonneux à proximité du fleuve Niger. Toutes ces caractéristiques induisent un ruissellement intense et une stagnation des eaux de pluie aux bords du fleuve.
La ville est aussi alimentée en eau par des systèmes aquifères et par un ensemble de petits cours d’eau, 912 km de réseaux, constitués de 778 km de caniveaux d’évacuation des eaux de pluie et de 134 km de marigot drainent la ville.

Cependant, ces derniers constituent à Bamako des sources d’inondations à chaque hivernage. En effet, les berges sont très souvent envahies et occupées par les populations qui, au mieux, y construisent leur habitat parfois même en occupant totalement le lit. Au pire, les marigots et leurs berges sont transformés en dépotoirs sauvages au détriment de la faune aquatique et de l’écosystème environnant.
Bilan du 13 août 2024 de la direction générale de la protection civile du Mali, révèle 52 cas d’inondations, 3 cas d’électrocutions, de foudres et 11 effondrements causant au total 29 295 victimes dont 12 pertes en vie humaine. Il est à ajouter, des pertes de cultures (Maïs, mil, etc.) dans certaines localités. Selon Mamadou Gaba, consultant environnementaliste, via WhatsApp.

Au regard de tout ce qui précède, quelles peuvent être les solutions innovantes que le Mali peut pratiquer pour limiter les causes des inondations ?
Selon Mamadou Gaba, consultant environnementaliste, le Mali dispose de plusieurs instruments institutionnels face aux changements climatiques et notamment les inondations. De ce fait, il a évoqué le cas de l’outil de prédiction des inondations dans le delta intérieur du Niger (OPIDIN), qui est un outil permettant de faire des prédictions quant aux pics de crue. Il fonctionne sur la base de relevés quotidiens des niveaux d’eau. Ce système d’information géographique, dit-il, montre aux usagers les pics prévus, les localisations géographiques et les périodes prévues d’atteinte de ces pics. Pour être plus précis, il indique que l’outil en lui-même et la page internet, ont été lancés le 1er Août 2013 et a eu des résultats assez satisfaisants.
Comme stratégies à mettre en place, il a mis l’accent sur la sensibilisation des risques et catastrophes au Mali et notamment les inondations. Aussi, qu’il faut également sanctionner les mauvaises pratiques telles que le remplissage des caniveaux par les déchets ménagers, la construction sur les passages d’eau, etc. La localité la plus touchée pour cette année, selon lui, c’est la ville de Bla. Mais d’année en année, on constate des dégâts un peu partout au Mali.
Aux dires de Mamadou Gaba, force est de constater la faible mise en œuvre du mécanisme de prévention face aux catastrophes par la population, notamment le plan national multirisques de préparation et de réponse aux catastrophes dont les inondations. Ces propos ont été évoqués sur WhatsApp à travers une interview.
D’après les propos de Niagalé dit Mahamadou Sanogo, Dr en restauration des terres dégradées à travers les technologies agro forestières face aux changements climatiques au Sahel. Également expert en changements climatiques et la promotion des emplois verts à l’ONG Mali-Folkecenter Nyetaa. C’était lors d’une interview qui nous a été accordée sur Whatsapp. Les changements climatiques, notamment la hausse des températures mondiales et les variations des régimes de précipitations, exacerbent les inondations au Mali. Les épisodes de fortes pluies deviennent plus fréquents et plus intenses. Comme autres causes selon cette source, la déforestation et la dégradation des sols diminuent la capacité d’absorption de l’eau, augmentant ainsi le risque d’inondations. Aussi, l’urbanisation rapide, souvent sans infrastructure adéquate de drainage, contribue à l’augmentation des inondations urbaines. Ensuite, l’agriculture intensive et les pratiques de gestion des terres non durables affectent le drainage naturel des eaux.
Pour faire face à cela, dit-il, le Mali a des solutions innovantes tels que : les systèmes d’alerte précoce que le Mali utilise pour prédire les événements climatiques extrêmes et informer les populations. Il ajoute, aménagement du territoire : La mise en place de zones de protection contre les inondations et la construction d’infrastructures de drainage améliorées. Réhabilitation des bassins versants : Projets visant à restaurer les écosystèmes naturels pour améliorer la gestion de l’eau.
Comme stratégies d’adaptation, notre interlocuteur nous propose : éducation et sensibilisation pour informer la population sur les risques d’inondation et les mesures de prévention ; de renforcement des infrastructures pour améliorer les systèmes de drainage et les structures de protection contre les inondations. Par la suite, la planification urbaine durable pour intégrer les risques climatiques dans les plans d’urbanisme et d’aménagement du territoire.
Pourquoi les risques d’inondations continuent ?
Dans le cadre de cette même interview, Mamadou Gaba, consultant environnementaliste répond en disant que, le phénomène d’inondation est souvent imprévisible suite aux changements climatiques. Les crus sont des fois très supérieurs à la moyenne prévisionnelle. « Néanmoins, en prenant toutes les dispositions nécessaires, nous pouvons circonscrire les risques », dit-il. Pour cela, il propose de poursuivre les travaux de curage et surtout les faires à temps bien avant la tombée des premières pluies. Aussi, de mettre en place des comités d’assainissement au niveau des communes et des quartiers, de dégager complètement les habitations se trouvant dans les lits des marigots, fleuves et affluents.
Pour conclure son propos, il précise que ce phénomène d’inondation est un problème majeur de risques et catastrophes dans le monde. En le prenant comme un risque élevé de santé sécurité, dit-il, nous arriverons à réduire substantiellement les dangers y afférents.
Comme stratégies d’adaptation, notre interlocuteur, Dr Sanogo, nous propose : éducation et sensibilisation pour informer la population sur les risques d’inondations et les mesures de prévention ; de renforcement des infrastructures pour améliorer les systèmes de drainage et les structures de protection contre les inondations. Par la suite, la planification urbaine durable pour intégrer les risques climatiques dans les plans d’urbanisme et d’aménagement du territoire.
« Bamako, la capitale souffre fréquemment d’inondations en raison de son urbanisation rapide et de la mauvaise gestion des eaux pluviales. Ségou et Mopti : Ces régions sont également vulnérables aux inondations en raison des changements dans les régimes de précipitations et des activités agricoles. Les inondations peuvent affecter des milliers de personnes chaque année, provoquant des pertes importantes en termes de biens et de vie », dit-il.
Pour lui, la mise en pratique des innovations est souvent limitée par le manque de ressources financières et la sensibilisation insuffisante. Cependant, des projets pilotes et des initiatives locales montrent des exemples positifs d’application des nouvelles technologies et méthodes. Il cite, les obstacles liés à la prévention des inondations sont entre autres : le manque de ressources financières : le financement insuffisant pour les infrastructures de drainage et les projets de prévention. Problèmes de gouvernance : Manque de coordination et de planification entre les différentes autorités locales et nationales. Changements climatiques imprévisibles : Les variations climatiques rendent difficile la planification précise et l’anticipation des événements extrêmes.
Dr Niagalé nous propose des solutions innovantes, à savoir : les techniques de gestion durable des eaux pluviales : Comme les systèmes de collecte et de stockage de l’eau de pluie pour une utilisation ultérieure. Agriculture de conservation : Utilisation de techniques agricoles qui améliorent la structure du sol et réduisent le ruissellement. L’utilisation de technologies de cartographie et de modélisation : Pour mieux comprendre et prédire les risques d’inondations.
« Le Mali fait face à des défis majeurs en matière de gestion des risques d’inondations, exacerbés par les impacts du changement climatique. Malgré les efforts déployés pour mettre en place des solutions innovantes et améliorées les infrastructures, les obstacles financiers et institutionnels freinent la mise en œuvre efficace. Pour réduire les risques, une approche intégrée est nécessaire, combinant l’amélioration des infrastructures, planification urbaine durable, et sensibilisation de la population », a-t-il constaté.
Selon le communiqué N0002 du comité interministériel de gestion des crises et catastrophes, sur la situation des inondations et de l’assistance aux sinistrés, publié le 15 août 2024, « malheureusement, 7 cas de pertes en vies humaines sont à déplorer sur la période du 7 au 15 août (2 à Ségou, 3 à Koutiala, 1 à Koulikoro, et 1 à Kita), portant le nombre total de perte en vies humaines à 15 cas ». Ce cas d’inondations selon ce même communiqué, ont engendré un bilan cumulé de 4150 ménages touchés soit un total de 32038 personnes sinistrées. Quant au district de Bamako, il a enregistré au total 24 cas d’inondations.
Le ministre de Sécurité et de la Protection Civile, Secrétaire permanent du Comité Interministériel de Gestion des Crises et de Catastrophes, précisé dans ce communiqué, a capitalisé les innombrables efforts consentis par le gouvernement du Mali. Notamment : la poursuite des opérations de sauvetage et de mise en sécurité des personnes sinistrées ; la distribution de vivres à 535 ménages sinistrés à Bla et Bakébougou, etc.
Les prévisions météorologiques annoncent d’importantes quantités de pluies par endroits avec des risques très élevés d’inondations sur la majeure partie du pays. De même, la situation hydrologique prévoit la poursuite de la montée des niveaux sur l’ensemble des cours d’eau. A cet effet, les population sont invitées à la vigilance et à la mise en œuvre des actions salvatrices de réduction des risques d’inondations à travers le respect des consignes suivantes : de libérer les emprises et les voies d’écoulement des eaux ainsi que les zones à risques d’éboulement ; de ne jamais s’engager sur une route ou une ruelle inondée à pied comme en voiture ; de ne jamais s’approcher des berges d’un cours d’eau en crue ou d’un canal d’évacuation. Aussi, de ne pas s’arrêter sur un pont que ce soit à pied ou en véhicule. « En cas de forte pluie, s’abriter dans un bâtiment ou un espace couvert et surtout pas sous un arbre pour éviter un risque de foudre », dixit le communiqué.
D’après cet article publié par VOA, le 19 août 2024, les pluies qui se sont abattues sur la capitale malienne toute la journée du samedi 17 août 2024 ont fait d’énormes dégâts notamment dans la commune VI. Le quartier de Missabougou de nombreuses familles continuent de réparer les dégâts causés par les eaux.
C’est très difficilement que Kadidia Dégoga parvient à rejoindre sa chambre et ses effets, du moins ce qu’il en reste. Elle et sa famille font partie des nombreuses victimes des inondations du quartier de Missabougou. Étant au marché quand il a commencé à pleuvoir, il a fallu la dextérité de son mari revenu très vite de son chantier, pour sauver la vie des enfants qui sont pris au piège par les eaux. « J’ai appelé mon mari qui est rentré très vite. C’est à l’aide des caisses de bananes qu’il a transporté les enfants sur les eaux qui étaient déjà montées pour les mettre à l’abri au bord du goudron”, explique Kadidia Dégoga.
Bintou COULIBALY
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