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Crise malienne : Enfin, un général de Barkhane admet la collusion de certains groupes armés maliens avec les jihadistes

mercredi 27 novembre 2019, par Assane Koné

« Les différentes opérations que nous avons menées récemment dans le nord, mais pas uniquement, notamment par la saisie d’un certain nombre de pièces à charge, démontrent la collusion qui existe entre certaines personnes de certains groupes armés signataires, et des groupes armés terroristes ». Selon notre confrère www.opex360, le général Christian Allavène, représentant de la force Barkhane au Mali, aurait fait cette déclaration lors d’une conférence de presse.

Il a fallu 7 ans pour que des officiers de l’armée française se rendent compte de cette réalité qui crevait les yeux au Mali depuis le début de la crise en 2012.

Les observateurs avertis avaient attiré l’attention de la communauté internationale, notamment la France sur le fait qu’il y a un vase communiquant entre les différents groupes armés au nord du Mali et les groupes terroristes. Bon, mais à l’époque la France s’était cramponnée à ne voir que les seuls « exploits du MNLA ». Nous nous souvenons tous, comme si s’était hier, lorsque le 7 février 2012, lors d’une intervention devant le Sénat français, Alain Juppé, ministre français des Affaires étrangères de l’époque, déclarait haut et fort que « la rébellion touarègue a remporté récemment d’importants succès militaires au nord du fleuve Niger…. Et d’ajouter ….. qu’il importe de traiter la question touarègue au fond, ce qui suppose un dialogue entre Bamako et toutes les parties concernées. J’en ai fait part au président Touré…. ». A l’époque, cette déclaration étrange du ministre des Affaires étrangères de la France, avait été perçue par de nombreux maliens comme un soutien à la rébellion qui ne disait pas son nom.

Et, plus tard, après le 11 janvier 2013, date d’entrée officielle de la France dans la guerre au Mali, sous le prétexte de bloquer les Djihadistes qui s’étaient emparés de Konan et qui affichaient une option sérieuse de prendre la ville de Mopti, les Maliens sidérés, ont été royalement servi avec l’interdiction signifiée à l’armée malienne d’accéder à Kidal, lors de la reprise des villes du nord. Alors, qu’elle était coude à coude avec les soldats français, quand elle n’était pas à l’avant-garde du combat pour la reprise de toutes les villes du nord sous occupation djihadiste, l’armée se verra interdire l’accès à la ville de Kidal.

En réalité, dans la crise au nord du Mali, à défaut d’être l’hôte des Djihadistes, le MNLA s’est pendant longtemps confondu dans leurs actions

En réalité, dans la crise au nord du Mali, à défaut d’être l’hôte des Djihadistes, le MNLA s’est pendant longtemps confondu dans leurs actions, jusqu’à ce que le MUJAO, excédé de ses exactions sur des paisibles populations, décide de l’éjecter de GAO. Et, depuis cette bataille épique dans la cité des ASKIA, personne n’entendait plus parler du MNLA au nord. Et, il a fallu que l’Armée française interdise l’accès de Kidal à l’armée malienne pour que le MNLA refasse surface pour faire de la capitale des Ifogas, une enclave dans le territoire malienne. Et, à quelle fin ? Si ce n’est pas pour assouvir des desseins inavoués ?

Et, pire, à la faveur de la signature en 2015 de l’Accord pour la paix et la réconciliation, la communauté internationale et l’Etat du Mali, n’ont pas eu le courage de dénoncer la fourberie du MNLA par la création de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) qui regroupe le MNLA et Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), qui lui prétend avoir absorbé l’organisation Djihadiste Ansar Dine de Iyad Ag Ghali, si ce n’est pas un simple changement de nom.

Si aujourd’hui la communauté internationale, notamment l’ONU se plaint du retard criard dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation, elle ne devait s’en prendre qu’à elle-même. Elle, doit admettre que cet accord n’est pas le fruit du dialogue entre le Gouvernement du Mali et les groupes armés. Le document a été imposé aux deux parties. Et chacune avait formulé des réserves pertinentes qui n’ont pas été prises en compte dans la monture finale. Donc, le moment est arrivé d’ouvrir les yeux et d’admettre que ces réserves sont aujourd’hui la principale source du blocage de la mise en œuvre de l’Accord et trouver une stratégie consensuelle pour les dépasser. Mais, même là, il va falloir s’assurer de la nature des différents groupes armés. Nous ne croyons pas qu’un groupe armé qui se bat pour l’application de la charia, puisse avoir le même agenda caché qu’un groupe qui se bat pour un Etat chimérique. Ils sont seulement dans une alliance stratégique face à un ennemi qu’ils considèrent commun : l’Etat du Mali. Et, dans un tel contexte, il n’y a aucun doute, la logique de vase communiquant est une réalité. Au nom de cette même logique, si la communauté internationale veut mettre fin au bourbier malien, elle devrait ouvrir les yeux et réserver le même traitement à tous les groupes armés sur le sol malien, à l’exception de l’Armée républicaine du Mali.

Il n’y a aucun doute, la sortie fracassante du célèbre artiste musicien Salif Keita n’est pas tombée dans des oreilles sourdes

Il est quand même surprenant que c’est seulement maintenant qu’un général français, Christian Allavène se rend compte de cette réalité évidente. Ou bien, c’est seulement maintenant que la France s’est décidée de vraiment ramener la paix au Mali. Il n’y a aucun doute, la sortie fracassante du célèbre artiste musicien Salif Keita n’est pas tombée dans des oreilles sourdes.

« Les différentes opérations que nous avons menées récemment dans le nord, mais pas uniquement, notamment par la saisie d’un certain nombre de pièces à charge, démontrent la collusion qui existe entre certaines personnes de certains groupes armés signataires, et des groupes armés terroristes ». Quand cette phrase vient d’un général qui représente la force Barkhane au Mali, il faut dire que les lignes ont commencé à bouger.

En effet, selon notre confrère de www. opex360, en juin 2016, l’entourage de Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, n’avait pas caché son « agacement » face à l’attitude du HCUA. « C’est un des groupes signataires des accords d’Alger mais en même temps, clairement, il n’hésite pas à afficher une forme de proximité avec Iyad Ag Ghali et Ansar Dine, que ce soit une proximité sur le fond ou d’hommes », avait expliqué, selon notre confrère, un proche du ministre. Et d’ajouter qu’il avait dit « Si on devait tolérer trop longtemps ce type de double jeu, par définition aller vers une solution sera compliqué ».

Malheureusement, aujourd’hui, l’on a l’impression que la France a trop longtemps toléré ce double jeu. Mais, la question c’est de savoir à quelle fin ? Est-ce c’est pour voir mourir bêtement et inutilement des soldats maliens et français, sans oublier les populations civiles ?

Sur le terrain, il arrive que des responsables ou membres des mouvements signataires de l’accord de paix d’Alger, reçoivent même des consignes de ces terroristes

Mieux vaut tard que jamais. La France doit se ressaisir et prendre le taureau par les cornes, du moment qu’il n’y a plus de doute. Le général Allavène a même ajouté que des écoutes téléphoniques démontreraient cette collusion. « Sur le terrain, il arrive que des responsables ou membres des mouvements signataires de l’accord de paix d’Alger, reçoivent même des consignes de ces terroristes », a affirmé RFI dans une de ses publications récente.

Mais, il y a des raisons de douter que l’Etat français accepte de tirer toutes les conséquences d’une collusion avérée. Au lieu de réserver le même traitement que celui réservé aux terroristes à tous ces groupes armés, la France va surement louvoyer. On apprend que les preuves collectées par la force Barkhane pourraient être utilisées pour sanctionner ceux qui entravent l’application de l’accord de paix, conformément à la résolution 2374 adoptée en septembre par le Conseil de sécurité de l’ONU.

Assane Koné


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