Communiqués > Prisons maliennes : Des organisations de la société civile demandent l’humanisation des lieux de privation de libertés

Prisons maliennes : Des organisations de la société civile demandent l’humanisation des lieux de privation de libertés

lundi 8 décembre 2014, par Assane Koné

Dans un Communiqué de presse conjoint des organisations et institutions de défense de droits humains au Mali estiment qu’il est impératif d’améliorer les conditions carcérales afin d’humaniser les lieux de privation de libertés. Lisez !

Bamako : le 05 décembre 2014 : Les 4 et 5 décembre 2014, nos organisations et institutions de défense de droits humains ont effectué dans le cadre de la semaine des droits de l’Homme, des visites des centres de détention à Bamako et dans les capitales régionales de Kayes, Koulikoro, Sikasso, Ségou, Mopti, Tombouctou, Gao et dans le cercle de Kangaba.

Il ressort de ces visites qu’en dépit des efforts accomplis par les autorités maliennes, les conditions de détention au Mali méritent une attention particulière.

Ces visites ont permis d’établir un certain nombre de constats.

Ainsi, nos organisations ont noté un problème notoire dans le domaine de la santé dû à l’insuffisance de médicaments et la lenteur dans la prise en charge de certains cas urgents y compris ceux des détenues enceintes de Bollé et des nouveaux nés.

Les conditions d’hygiène insuffisantes se traduisent notamment par le mauvais état des sanitaires, l’état de délabrement des cellules en particulier à Kangaba et le problème d’aération de certaines cellules…

S’agissant de l’alimentation et de l’accès à l’eau potable, les centres de détention demeurent confrontés aux problèmes respectifs de qualité, de quantité et d’approvisionnement. Rappelons que « tout détenu a droit à une alimentation ayant une valeur nutritive suffisante au maintien de sa santé » (article 20 de la loi N°85-42/ANRM du 28 juillet 1985 portant sur le régime pénitentiaire).

Concernant les infrastructures, la problématique de la surpopulation carcérale se pose avec acuité, spécialement à la maison centrale d’arrêt de Bamako qui à la date du 4 décembre 2014, accueille 1821 détenus pour une capacité initiale de 400, et dont notamment une cellule prévue pour 50 détenus enferme actuellement 95 personnes.

En ce qui concerne les procédures judiciaires, en dépit de l’existence de la loi N°082 du 24 août 2001 relative à l’assistance judiciaire, qui permet à toute personne indigente un accès gratuit à un conseil juridique et le dispense des droits de timbre, d’enregistrement et de consignation, force est de constater que la quasi-totalité des détenus n’ont pas accès à ce droit.

En outre, il a été constaté que sur les 1821 détenus à la Maison Centrale d’Arrêt, 1091 soit environ 60% sont en détention provisoire, à Bollé femme et mineur 166 sur 206 détenus soit 80% sont des prévenus. Il convient de signaler que les délais légaux de détention ne sont pas respectés dans certains cas. Ce qui montre à suffisance toute la lenteur des procédures judiciaires, constituant une violation du principe « d’être jugé dans un délai raisonnable ».

Si aucun cas confirmé de tortures n’a été enregistré à l’actif des différents lieux de détention visités, il convient de signaler que certains détenus ont été torturés lors de leur passage à la sécurité d’Etat (SE).

Concernant les activités en détention, même si certains centres tels que Bollé et la MCA proposent des activités culturelles et de détente, de formation et du travail, d’autres centres notamment le camp 1 ne proposent aucune forme d’activités permettant aux détenus de maintenir leur état de bien-être physique et mental.

Si le problème de visites familiales ne se pose pas, cependant le temps et cadre de visites nous semblent inappropriés.

Au regard de ces constats, nos organisations et institutions de défense de droits humains exhortent les autorités maliennes à :

i. Mettre en place des moyens et système adéquats pour la prise en charge précoce et l’approvisionnement en médicaments des détenus malades ;

ii. Veiller à l’entretien régulier des sanitaires, des cellules ainsi que le système d’évacuation des eaux usées ;

iii. Améliorer l’alimentation des détenus en qualité et en quantité et le cas échéant approvisionner les centres qui sont dans le besoin ;

iv. Diligenter la délocalisation de la maison centrale d’arrêt de Bamako afin de la désengorger et garantir les conditions sécuritaires optimales ;

v. Prendre les mesures nécessaires afin de pallier à la surpopulation à travers notamment la construction de nouveaux centres de détention, la célérité dans le traitement des dossiers des détenus, etc…

vi. Veiller au respect strict des délais de détention et du droit d’être jugé dans un délai raisonnable à travers notamment la mise en œuvre par les régisseurs des maisons d’arrêt des dispositions pertinentes des articles 83 alinéa 3 et 129 du code de procédure pénale ;
vii. Veiller au respect des dispositions des "Principes des Nations Unies pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement" et des recommandations du Rapporteur spécial de la CADHP sur les prisons et les conditions de détention ;

viii. Mettre en place des moyens financiers et logistiques pour l’application de la loi N°082 du 24 août 2001 relative à l’assistance judiciaire ;

ix. Veiller au respect strict de la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ratifiée par le Mali le 26 février 1999 ;

x. Prévoir des activités culturelles et sportives particulièrement au Camp I et la mise à disposition des encadreurs notamment à Bollé mineur afin de veiller au maintien de l’état de bien être physique et mental du détenu comme prévu par le régime pénitentiaire ;

xi. Améliorer les conditions de travail de l’administration pénitentiaire et du personnel judiciaire et de sécurité et renforcer davantage leurs capacités sur les droits de l’Homme, particulièrement en matière de détention.

Liste des signataires

1. Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture-ACAT Mali
2. Action Citoyenne pour la Promotion des Droits Humains-ACPDH
3. Association pour le Progrès et la Défense des Droits des Femmes-APDF
4. Amnesty International-AI Mali
5. Association DEME-SO
6. Association des Juristes Maliennes-AJM
7. Association Malienne des Droits de l’Homme-AMDH
8. Association Malienne de Droit International-MIDA
9. Avocat Sans Frontières-ASF Mali
10. Association pour la Consolidation de la Paix, le Développement, la Protection et la Promotion des Droits Humains-TEMEDT
11. Consortium Actions Droits Humains-CADH
12. Centre d’Assistance et de Promotion de Droits Humains-CAPDH
13. Coalition Malienne des Droits de l’Enfant-COMADE
14. Coalition Malienne des Défenseurs des Droits Humains-COMADDH
15. Coalition Malienne pour la Cour Pénale Internationale-CM-CPI
16. Collectif des Femmes du Mali-COFEM
17. Commission Nationale des Droits de l’Homme-CNDH
18. Femmes et Droits Humains-F&DH
19. Fédération Nationale des Collectifs d’Organisations Féminines du Mali- FE.NA.COF
20. Fédération Internationale des ligues des droits de l’Homme-FIDH
21. Groupe Pivot Droit et Citoyenneté des Femmes-GP/DCF
22. Ligue Pour la Justice, le Développement et les Droits de l’Homme-LJDH
23. Observatoire des Droits Humains et de la Paix-ODHP
24. Plate-Forme DESC
25. Réseau des Défenseurs des Droits Humains
26. Réseau des Femmes Africaines Ministres et Parlementaires-REFAMP
27. Réseau Paix et Sécurité des Femmes de l’Espace-CEDEAO-REPSFECO/Mali
28. Regroupement des Jeunes pour le Développement du Mali-RJDM
29. Réseau des Journalistes pour la Promotion des Droits de l’Homme-R.J.PRO.D.H
30. Tribune Jeunes pour le Droit au Mali - TRIJEUD-MALI
31. Women In Law and Development In Africa-WILDAF Mali
Le 05/12/2014 23:17, Drissa Traoré a écrit :

Drissa TRAORE Chargé de Programme conjoint FIDH-AMDH Tel : 78 16 51 07/68 61 61 11

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.