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Festival « Ecrans d’Afrique » : Une école du cinéma à Ségou

mercredi 12 avril 2017, par Assane Koné

Les organisateurs de la première édition du festival « Ecrans d’Afrique » ont choisi les journées des 30, 31 mars et 1er avril 2017 pour tenir l’activité dans la capitale des balanzans. A l’occasion les communes rurales de Sébougou et Pelengana, la salle Mieruba et la place de l’Indépendance à Sogolakono ont reçu les séances de projections.

Il a été question de faire partager les œuvres réalisées par des jeunes de Ségou dans le cadre d’un processus de formation à la réalisation cinématographique. Les ‘’ élus ’’émergeant d’une présélection de 2012 qui avait d’abord retenue six idées de films sur une trentaine, des idées qu’il a ensuite fallu agencer par la rédaction en scenario. Suite à la crise socio politique en 2016, un deuxième groupe a été présélectionné et à déboucher sur cinq nouvelles meilleures idées sur près de vingt propositions. Avec les meilleurs de 2012, c’est un total de onze initiatives. Les11 auteurs ont été encadrés par un professionnel pour la rédaction des idées de base en scénario et leur réalisation ou mise en images. La programmation du festival comprend donc la projection des courts métrages obtenus, en présence des jeunes créateurs, des professionnels du cinéma et bien des cinéphiles.

De scénariste à réalisateur

L’initiative de l’association culturelle carrefour (ACC) a cela de pédagogique qu’elle suscite et ou entretien des vocations pour les métiers de l’audio-visuel. Les 11 ‘’lauréats ‘’ ont entre 15 et 19 ans , mais sont conscients des récurrentes problématiques du mariage précoce et du sida (‘’La déception ’’ est de Kadidiatou Barry , terminaliste de 17 ans qui entend se « marier après l’université, quand j’ aurais une autonomie financière pour aider maman ») .

Un des cinq sélectionnés de 2016 a traité de ‘’l’ingratitude ‘’d’un homme envers son épouse qui l’avait aidé à sortir du chômage. Djibril Diarra qui est en 2e année générale après le DEF, en formation de quatre ans à l’institut de formation des maitres, se destine à l’enseignement.

Des tares sont dénoncées et des valeurs remises au goût du jour ; par exemple la jeune fille qui demande que ses parents la donne en mariage pour compenser la fuite de son ainée qui était promise. La cadette préserve ainsi l’honneur de la famille.

Dans un autre film, c’est la svelte Walett qui préfère le conducteur de tricycle à moteur à l’automobiliste frimeur (intégration d’une nordiste au sud) , alors que prostitution et consommation de drogue sont déplorés par Souleymane Sow dans ‘’ Ma mère’’.

Suprême signe de fidélité, la fiancée accepte de faire la folle dans ‘’Sauver Abdel’’de Hamza Sylla, parce que la vie de son homme en dépend. Autant que la pitié puisse conduire à l’amour, les réalisateurs en herbe ont généralement su exploiter drame et pointe d’humour ; à travers ‘’les pièges de la vie’’, le jeune Diallo démontre comment une fille de bonne famille s’emmourache d’un jeune indigent (« -guéribouni zamèè ?! Le mendiant peut-il espérer du riz gras ?! »).

Cinéma sans Fespaco

Tout comme un délestage électrique et l’occupation pour la balance d’après-midi d’un orchestre (en prélude à un concert) ont éclaircit l’agenda, les promoteurs doivent prévoir des solutions de substitution. Ils devront aussi ‘’s’armer ‘’ d’au moins deux projecteurs. Aucune projection ne doit être interrompue parce qu’un autre site attend l’appareil. Compte tenu des distances entre les lieux de projection et de la rareté des taxis, les festivaliers en général et les lycéens lauréats en particulier, doivent disposer d’une navette pour rallier les différents sites. Il reste entendu que le respect des heures de projections demeure une préoccupation pour une activité qui se veut pédagogique (« bébé de confession culturelle » selon Salif Traoré), les parents n’apprécient certainement pas que les enfants soient à une quelconque activité au-delà de 23 heures. S’il y’avait du monde vendredi soir sur la place ‘’terrain du maire’’ à Pelengana , le défi de la mobilisation reste à relever ; le secrétaire général de l’union nationale des cinéastes du Mali UNCM , Salif Traoré souhaitait dès l’ouverture que les salles soient pleines les années à venir.

En attendant, la critique étant relativement facile, les mauvaises langues diront que le nouveau festival a fait un ratage parce que sa programmation n’a inclue aucun film primé au Fespaco il y a un mois (peut-être faudrait-il un autre festival du cinéma au Mali pour qu’on puisse découvrir les nôtres les plus distingués et leurs œuvres ?!). Les trois soirées ont en tout cas permis de déguster ‘’Guimba ‘’ de Cheick Oumar Cissoko (‘’Etalon de Yennenga ‘’),‘’La danse du singe’’ de Salif Traoré et ‘’les aventures de Seko Bouaré’’ de Boubacar Sidibé.

Culture et rentabilité

‘’Ecrans d’Afrique’’ a donc réuni de grands noms du cinéma tels l’ancien ministre Cheick Oumar Sissoko (Secrétaire General de la fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI) et le Directeur-Photo Mohamed Lamine Touré, membre de la fédération des artistes du Mali (FEDAMA) et de l’UNCM. Etaient également à Ségou : Fatoumata Coulibaly dite ‘’FC’’ actrice, réalisatrice et formatrice , Mamadou Kotigui Cissé , réalisateur de ‘’Ra, la réparatrice ‘’, récemment membre du jury du documentaire du Fespaco 2017 , les comédiennes Maimouna Doumbia ’’Kôchien’’ et ‘Aminata Koné ‘’Koro’’ de même que Chiaka ’’BA’’ Koné , acteur et danseur de la troupe ‘’’Centre Yèrèdon’’(sans ses cheveux nattés , il a joué dans ’’Yeelen’’ de Souleymane Cissé qui obtint le prix spécial du jury du festival de Cannes en 1987).

Relancer le cinéma

Le jeudi 30 mars 2017, dans la salle de 749 places du Miérouba (rénové en 2005) à moitié pleine, les ’’korèduga’’ qui ne sont de simples bouffons sont d’abord venus pour ‘’Nyamanfifa’’, chasser l’esprit maléfique juste avant que le conseiller aux affaires administratives et juridiques du gouvernorat, Issiaka Bathily ne lance officiellement le festival.

Conformément a l’esprit du festival, la prestation des marionnettes ‘’Yayoroba’’ de Pelengana est venue replonger le public dans l’authenticité régionale. Pour conclure on peut dire que la trouvaille ne manque pas de prospections tant elle permet de repasser en revue les difficultés du monde du cinéma.

Khadidia Sidibé du cinéma numérique ambulant (CNAM) a assuré la modération de la causerie débats. Cheick Oumar Sissoko s’est penché sur « le cinéma éducationnel » pour préconiser l’utilisation de nos langues nationales dans les productions mais aussi l’implication des opérateurs économiques et des banquiers) .Toutefois, compte tenu de son accompagnement par des professionnels de l’audiovisuel et du spectacle, le festival est condamné à s’améliorer. La vocation de la manifestation ne semble pas à court ou moyen terme d’être des « Ecrans d’Afrique », la réflexion peut également se faire pour une dénomination plus originale et conforme à la pellicule (ou contenu) des journées.

Moïse TRAORE
Email : motra3000@yahoo.fr


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