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Victimes maliennes de l’immigration : L’hommage de l’AME et de la CADERKA
mercredi 26 décembre 2018, par
La Coordination des Associations de Développement de la Région de Kayes (CADERKA) et l’Association Malienne des Expulsés (AME) ont organisé le 15 décembre 2018 à la Maison des Ainés, la cérémonie d’hommage aux victimes de l’immigration. Elle s’inscrivait dans le cadre de la commémoration de la journée mondiale des Migrants, célébrée chaque année le 18 décembre.
La journée a enregistré des représentants des associations humanitaires, du Projet des migrants, et les acteurs de la société civile. Elle a servi d’espace d’échanges avec les acteurs concernés. Dr Fodié Tandjigora, sociologue et Ousmane Diarra, président de l’AME, ont fait une présentation en relation avec les différents facteurs du phénomène migratoire.
Les experts ont rappelé que depuis les évènements de Ceuta et Melilla en 2006, les flux d’émigration à partir de l’Afrique Sub-saharienne vers l’Europe font l’objet de mesures drastiques restrictives d’entrée et de séjour dans tous les pays européens. Ils ont déclaré que les conséquences, de ces mesures drastiques se manifestent par des traitements inhumains dans les pays africains, de transit et de morts d’hommes dans le Sahara et dans la Méditerranée. C’est ainsi que l’Organisation Mondiale des Migrations (OIM) a décidé de consacrer une Journée annuelle aux victimes de la migration.
« Le Mali était plus un pays d’immigration que d’émigration », ont-ils indiqué. En ajoutant qu’aujourd’hui, le Mali, par sa position géographique et pour d’autres raisons, tout en continuant à être un pays d’immigration est un pays de départ par excellence, à cause des conditions de vie à l’interne obligeant ses fils au départ.
Tout laisse à croire que l’eldorado se trouve au-delà de nos frontières
Selon ces experts, les candidats au départ préfèrent faire face à tous les risques de l’émigration contre l’incertitude de leur épanouissement dans le pays. « Toutes les régions du Mali sont concernées par le phénomène, mais la région de Kayes demeure la zone d’excellence de départ et a connu le plus grand nombre de victimes du fléau », ont-ils indiqué.
Il faut aussi noter que le durcissement des conditions d’entrée dans les pays dits de l’ « eldorado » multiplie et renforce les réseaux mafieux de passeurs et la prise de chemins les plus risqués pour les candidats. Il se trouve justement que les zones de départ des candidats à l’émigration sont immensément riches en ressources naturelles de tous ordres, favorables à leur développement économique et à l’épanouissement des populations locales, régionales, voire nationales.
Contribution des Migrants dans le développement
Nonobstant toutes les difficultés et autres tracasseries et risques depuis le Mali jusqu’à leurs pays d’accueil, selon eux, les migrants maliens en général et ceux de la région de Kayes en particulier, ont le sens aigu de l’organisation. Ils se retrouvent entre eux pour s’entre-aider à s’insérer dans beaucoup de sphères d’activités génératrices de revenus : commerce, mines, courtage, agriculture, usines, centres de recherches, Universités, etc. Ils ont noté que c’est aussi la réussite des africains qui sont partis en Europe qui incite beaucoup d’autres à prendre les chemins, même les plus périlleux de l’émigration au lieu de rester dans l’incertitude de leur épanouissement au pays natal.
Au-delà même des Conventions Universelles sur les Droits des Migrants, ceux de l’Afrique Subsaharienne, au lieu d’être des menaces pour les pays d’accueil, doivent être considérés comme des vecteurs de développement « ici et là-bas ».
Difficultés de l’émigration et témoignages
Les organisateurs ont expliqué qu’aujourd’hui, malgré des mesures réglementaires (libre circulation des personnes et des biens) pour réguler les déplacements des africains entre pays africains, des difficultés de plus en plus croissantes entravent ces mesures règlementaires, pour des raisons sécuritaires et de protectionnisme économique. Il en est de même, encore plus, pour les autres continents, notamment dans cette Europe forteresse qui ferme ses frontières internes et barricade ses frontières externes avec des faux principes (Agences Frontex, Corps de Garde-frontières, et de Garde-Côtes ; des restrictions dans le Droit d’Asile, etc.).
Ils ont estimé qu’il y a des difficultés pour donner le nombre de maliens reconduits vers le pays. Selon eux, tous ceux qui sont reconduits au Mali ne sont pas tous forcement des nationaux. Toutefois ils ont donné les chiffres suivants comme indication : de 2002 à 2011, 77.367 dont 70.732 étaient en provenance d’autres pays africains ; en 2012, 1.127 ; en 2013, 6.598 ; en 2014, 2.821 ; en 2015, 3.119 ; en 2016, 4.000. Les chiffres de 2017 et de 2018, sont en cours d’évaluation.
Pour ce qui concerne le nombre de pertes en vies humaines, les experts ont indiqué qu’au Mali l’exemple le plus affreux est celui arrivé aux larges des côtes Libyennes, communiqué officiellement par le gouvernement du Mali, en date du 03/08/2014. Cela concerne 209 maliens naufragés, majoritairement originaires de la région de Kayes, plus précisément de Sélinkégni/Tomora, cercle de Bafoulabé.
Lors de cette rencontre, les organisateurs ont proposé des solutions alternatives à l’émigration. Ce sont : renégociation des accords pour l’obtention des visas de sortie, la valorisation des potentialités de développement du Mali, l’aménagement hydro-agricoles, pastoraux, sylvicoles et piscicoles, la promotion du Système « P. C. T. C. » et l’installation de Villages Agricoles.
« Tous les pays de l’Afrique Subsaharienne recèlent d’énormes potentialités qui méritent d’être mises en valeur pour le bonheur de leurs populations, pour leur développement et pour mettre fin aux diverses tragédies que subissent leurs ressortissants sur les chemins de l’émigration », ont-ils révélé. Et de lancer que tous les acteurs concernés par cette question et dans tous les continents, doivent accepter de se mettre ensemble pour trouver des solutions appropriées à la question et pour préserver les équilibres entre les peuples du monde.
« Les migrants de l’Afrique Subsaharienne en général et ceux de la région de Kayes en particulier ne sauraient être une menace pour les pays d’accueil mais plutôt des vecteurs de développement aussi bien pour leurs pays d’origine que pour les pays d’accueil », ont-t-ils conclu.
Bintou COULIBALY
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