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Communication gouvernementale : Le gouvernement prend l’ORTM en otage

samedi 18 avril 2015, par Assane Koné

Le combat l’impartialité et l’égal accès aux médias d’Etat domine toujours l’actualité au Mali. Engagé dans une bataille médiatique, la nouvelle stratégie de communication gouvernementale prend la chaîne nationale en otage.

La stratégie de communication du gouvernement se porte très mal. L’actuel pouvoir semble avoir du mal à partager les canaux de communication avec la population. Et pourtant, la politique était parmi les priorités du président IBK qui n’a jamais manqué l’occasion pour critiquer violemment la politique de communication du régime précédent, lorsqu’il cherchait ses marques dans un fauteuil d’opposant.

Aux commandes depuis 2013, le président IBK et ses différents gouvernements semblent ignorer ce qu’ils ont appelé dans le temps les « contrebalances » de la communication de la présidence. Les observateurs se rappellent de ces propos du cercle fermé d’IBK à l’époque et le clan Oumar Mariko, du parti Solidarité africaine, de
la démocratie et de l’indépendance (Sadi).

« La chaine nationale fait toutes les manœuvres pour satisfaire ATT et son fameux Programme de développement économique et social (PDES). La démocratie malienne est une farce. L’écrasante majorité de la population est ignorée dans les débats politiques et la liberté d’expression n’est pas assurée », disaient -ils. Mais les différents gouvernements d’IBK viennent de mettre un coup de chapeau à cette vieille pratique décriée par le peuple dans sa diversité. La classe politique et les observateurs de la scène politique leur reprochent de prendre l’ORTM en otage.

Les atouts de la transition massacrée

Si le président de la République devait être fier d’un atout de son prédécesseur, c’est bien la stratégie de la transition en matière de communication. Et les simples citoyens ne le démentiront pas. Dioncounda avait assuré l’impartialité, l’équité, l’exactitude et l’efficacité de la couverture médiatique des médias publics à tous les citoyens.

A l’époque l’attitude a été appréciée par l’organisation internationale de défense des droits de l’Homme qu’est Amnesty International Mali, la Copam (A et B) et le Mouvement populaire du 22 mars, qui ont déclaré que toutes les organisations bénéficiaient de la même couverture par la chaine publique (Office de la radiodiffusion télévision du Mali), lors des points de presse. Loin de là, L’ONG one World UK avait porté son projet d’étude sur la question durant 3 mois pour apprécier objectivement et de façon scientifique, la couverture médiatique en période électorale, et de vérifier la conformité de l’activité des médias. Au terme de 3 mois d’observations, les experts ont conclu qu’une nette lueur d’espoir s’était installée.

C’est dire que le gouvernement de transition avait l’expertise d’une gestion des médias d’Etat.

L’unanimité est faite autour d’une question : les médias sont des moyens rapides et même « sûrs » d’information, de communication, d’éducation, de sensibilisation, d’instruction et même de divertissement des populations. Ce qui fait dire à certains qu’ils ont aujourd’hui un grand rôle dans la politique de développement d’un
pays.

Au regard de l’évolution de la situation, le gouvernement actuel et les précédents n’ont pas pu profiter de ses acquis. La grande édition du journal télévisé suffit pour ce faire une idée sur la question à l’ORTM. Rares sont ceux qui accordent de l’importance au journal de la chaine nationale. Les regards sont tournés vers les chaines internationales. Question de ligne éditoriale de l’ORTM ? Ni la forme, ni le contenu ne donnent l’impression aux téléspectateurs avérés de suivre l’édition. A Bozola, les confrères estiment que les éléments sont classés par ordre : Koulouba, partenaires techniques et financiers, primature, les autres membres du gouvernement et les petits
commentaires.

Le Mouvement populaire du 22 mars a attiré l’attention de la presse sur la question lors de sa derrière-conférence de presse. La question a fait coulé beaucoup d’encre et de salives, récemment au siège du parti de la poignée de main à Badalabougou, qui par la suite a saisi la direction de la télé et le Comité national de l’égal accès aux médias d’Etat à travers une correspondance.

Les organes ont reconnu les faits qui leur sont reprochés. Ensuite le communiqué des partis de l’opposition sur les évènements du 27 janvier 2015 à Gao a été en grande partie censuré. Ce communiqué dont nous détenons une copie engageait le gouvernement face à ses responsabilités. Une partie a provoqué des critiques contre l’opposition, traitant Soumaila Cissé et son clan d’apatrides.

Pour illustrer nos propos, le récent meeting des amis du président déchu, a bénéficié d’un angle de traitement de la chaine nationale qui a complètement dénaturé l’évènement. D’autres témoignent qu’il n’est pas fréquent de donner un temps d’accès direct (TAD) à une marche de protestation. Les Maliens sont habitués à au moins trois éléments de reportage par édition sur les voyages du président et un magazine de synthèse. Parfois les communications importantes engageant la vie de la nation, prises lors du conseil des ministres sont souvent censurées pour diffuser les visites d’IBK.

La nouvelle politique de langue nationale va rapidement posée problème. Toutes les décisions intéressantes seront lues dans les 13 langues officielles du pays. La promotion des langues est importante dans le pays, mais la méthode du gouvernement risque d’avoir des répercussions sur des programmes de l’ORTM. Dans ces conditions, la mission de service public pourra-t-elle être bien assurée par la chaine nationale ?

Le gouvernement de la République doit donner un nouveau souffle aux médias d’Etat, à travers des débats contradictoires et l’égalité dans leur accès. Les responsabilités exigent de la presse de fournir des informations suffisamment diversifiées et équilibrées à la population.

Bréhima Sogoba

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