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« L’ombre de la folie » : Le long métrage de fiction de Boubacar Gakou qui dénonce les conflits entre éleveurs et agriculteurs
samedi 3 octobre 2015, par
Il a émerveillé le public du cinéma Babemba, le 3 octobre 2015. Mais, lors de la projection presse le dimanche 27 septembre 2015 à Kora films, « L’Ombre de la folie » de Boubacar Gakou, avait déjà annoncé les couleurs. Dénonciation des conflits entre éleveurs et agriculteurs, sa sempiternelle dénonciation de la condition paysanne et la corruption des élites, sont les ingrédients de ce film qui marque le volontarisme de nouvelle génération de réalisateurs maliens et de comédiens.
Décidément, les pages de l’histoire du cinéma malien, en tout en ce qui concerne la nouvelle génération, s’écrivent grâce à la volonté des jeunes réalisateurs et des techniciens de plateau.
Ce n’est un secret pour personne. L’argent fait énormément défaut au cinéma malien. Et, c’est pratiquement un miracle que des maliens arrivent encore à faire des films. Le film long métrage de Boubacar Gakou intitulé « L’Ombre de la folie », avec un peu de soutien financier allait devenir un chef d’œuvre du cinéma malien.
Mais, qu’à cela ne tienne. Etant donné qu’à cœur vaillant rien n’est impossible, le réalisateur Boubacar Gakou et des jeunes comédiens maliens, convaincus qu’il n’est pas évident que l’argent arrive de sitôt pour la réalisation malienne, ont décidé dans un élan volontariste de réaliser un film dont le budget prévisionnel était de 90 millions FCFA, avec à peine un million de nos francs. Quelle prouesse. Le film existe et il n’est pas du tout mal. Quoique pourrait penser les puritains du cinéma, ils devront d’abord se demander de quel budget ce film a bénéficié.
Ici, nous saluons cette rage de faire du cinéma, sans moyens. C’est un nouveau militantisme pour le cinéma africain que les guichets à travers le monde et l’Afrique veulent condamner à mourir. Heureusement qu’il y a des jeunes réalisateurs africains comme Boubacar Gakou qui disent à qui veut l’entendre qu’ils feront du cinéma, leur cinéma, avec ou sans argent.
Pour l’absence d’un financement pour la réalisation de son film , le réalisateur Boubacar Gakou et son film méritent l’attention de tous ceux qui sont engagés dans la promotion du cinéma africain. Il a du talent et mérite d’être soutenu.
Ce jeune réalisateur malien que nous avions connu grâce à un merveilleux film document sur la condition du paysan malien dans la zone office du Niger au Mali, est décidément fidèle à sa thématique. Boubacar Gakou est le cinéaste du monde rural. Pour son premier film de fiction long métrage, il est resté fidèle à la thématique de la misère du paysannat africain.
Dans « L’ombre de la folie », le jeune réalisateur Boubacar Gakou invite les jeunes africains diplômés à se mettre au service de leurs communautés quoiqu’il advienne.
Pour cela, il a décidé de mettre sur le grand écran l’aventure de Idi Samaké et de Fati Traoré, un jeune couple.
Anciens pensionnaires d’une école d’agronomie, Idi Samaké et Fati Traoré, décide d’aller vivre au village auprès des parents, dans l’espoir de pouvoir les accompagner dans la maîtrise des nouvelles techniques agricoles correspondantes aux réalités environnementales.
En plus de la condition de vie difficile des paysans africains, Boubacar Gakou dans son film dénonce les conflits entre éleveurs et cultivateurs. Alimentés par des fonctionnaires véreux, ces conflits ne font ni le bonheur des cultivateurs, ni celui des éleveurs.
Pour éviter de voir son champ à la merci d’un troupeau, Idi Samaké, comme tous les paysans, se voit condamner à surveiller son champ de riz jour et nuit.
Mais, une nuit, le champ de Idi eu la malchance d’être visité par un troupeau de bœufs sous la garde de deux jeunes bergers. Le champ sera dévasté. Une âpre discussion entre Idi et les jeunes bergers, va se terminer dans un drame : Idi sera assommé par les bergers.
Ce traumatisme va énormément affecter sa santé mentale. La réparation du dommage réclamée par ses parents ne verra jamais le jour. Le père des jeunes bergers est un protégé du gouverneur de la région. Et, la police sera mis à contribution pour que l’affaire ne franchisse pas les limites du champ où Idi a été agressé.
Souvent très taciturne, mais le plus souvent très violent, il Idi qui ne jouit plus de ses facultés va commettre un double crime. Munit d’un gourdin il va attenter à la vie de son géniteur et de celle de sa belle sœur.
Arrêté par la police locale, puis interné dans le service psychiatrique d’un centre hospitalo-universitaire, son état va s’améliorer grâce aux soins.
De retour au village, pour les villageois, Idi reste dangereux. Déstabilisé par cet accueil particulier de sa communauté, il va obliger son frère à lui expliquer les raisons. La vérité insupportable pour lui, après avoir appris qu’il est l’auteur d’un parricide et de la mort de sa belle sœur, il va se donner la mort. Mais, sans regret, parce qu’il est parti avec la certitude que son épouse enceinte de deux mois va lui donner un « Fako », qui va valablement le remplacer.
C’est sur cette trame pathétique que Boubacar Gakou a décidé de dénoncer la misère du monde rural et les conflits entre éleveurs et agriculteurs.
Assane Koné