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Justice : L’opérationnalisation des juridictions militaires démarre au Mali

jeudi 24 août 2017, par Assane Koné

L’affaire Ministère Public contre le Lieutenant-colonel Alkalifa Ag Amahi est le premier dossier qui sera jugé par le Tribunal militaire de Bamako.

« Les présentes assises ordinaires s’inscrivent dans la dynamique d’opérationnalisation des juridictions militaires », a indiqué Cheick Oumar Sogoba, Procureur de la République près du Tribunal militaire de Bamako. C’était le 24 août 2017, lors de la 1re audience ordinaire publique du Tribunal militaire de Bamako.

L’affaire Ministère Public contre le Lieutenant-colonel Alkalifa Ag Amahi est le premier dossier qui sera jugé par le Tribunal militaire de Bamako. Selon le Procureur Cheick Oumar Sogoba, c’est après un long processus parsemé d’écueils dans le traitement des dossiers dans les Cabinets d’instruction et parquet, que cette affaire, en état d’être jugée, a été programmée.

Ce premier procès a été précédé d’une cérémonie solennelle qui a enregistré la présence du ministre de la justice garde des sceaux, Me Mamadou Ismaël Konaté, du ministre de la sécurité et de la protection civile, le Général de Brigade Salif Traoré et du Chef d’Etat major général des armées du Mali, représentant le ministre de la défense et des anciens combattants.

« La tenue de cette session traduit la volonté des plus hautes autorités à doter nos forces armées d’une justice adaptée aux réalités et à la spécificité de la fonction militaire pour lutter contre l’impunité au sein des FAMAs », a indiqué le Procureur de la République. Avant d’incité que ce procès marque la dynamique de l’opérationnalisation des juridictions militaires de Bamako, kayes et Mopti.

Ensuite, le Procureur Cheick Oumar Sogoba a expliqué le pourquoi d’une justice militaire différente d’une justice de droit commun. Selon lui, sur le plan technique, le service militaire en tant qu’institution de l’Etat est une société à part entière avec des traditions, un langage, des réalités qui lui sont propres.

« Une véritable culture militaire existe et il faut en tenir compte dans l’administration de la justice en général, par la création d’une juridiction spécialisée à l’instar d’autres pôles de juridictions : mineurs, économiques et financières, terrorisme », a-t-il indiqué. Avant d’ajouter qu’il y a lieu d’admettre que par leur nature, certaines infractions ne peuvent être commises que par des militaires et pour les maitriser, il faut être imprégné de la réalité de la vie militaire.

Il a aussi ajouté que le caractère sensible de tout ce qui touche à l’institution militaire recommande de mettre l’armée à l’abri de tout ce qui peut porter préjudice à son image, à sa renommée, à sa crédibilité et à ses missions.

« Juger les affaires militaires devant les tribunaux de droit commun peut fragiliser le service militaire et compromettre même la fonction militaire au sein de l’Etat. Il s’agit là de protéger l’Etat à travers l’institution militaire », a-t-il estimé.

Pour tout cela, il dira que loin de promouvoir une certaine tendance à l’impunité, la justice militaire vise à réprimer le plus efficacement possible les infractions qui rentrent dans le cadre de sa compétence.

Pour sa part, Me Alassane Sangaré, Bâtonnier de l’ordre des Avocats du Mali, a fait une observation sur la nature du tribunal. « Nous sommes devant une juridiction d’exception par rapport à la procédure et la configuration de la salle d’audience qui est décorée de la photographie officielle du Président de la République », a-t-il indiqué.

Apparemment hostile au tribunal militaire le bâtonnier dira que la justice militaire n’est pas une justice. Cependant, comme elle existe, il dira qu’il va falloir s’y faire, en espérant que le droit parlera au cours des différentes audiences, étant entendu que la justice reste le dernier rempart du citoyen qu’il soit militaire ou civil.

Moussa Diarra, Conseiller à la Cour d’Appel de Bamako et Président du Tribunal militaire de Bamako, a rappelé qu’en 1732, Maurice Saxe écrivait dans son livre ‘’Mes Rêveries’’ que « après avoir rassemblé des troupes, la première des préoccupations qui surgit est la discipline. Elle est l’âme des armées. Si elle n’est pas implantée avec sagesse et maintenue avec fermeté, vous n’obtiendrez pas de soldats. Vos régiments et vos armées seront alors constituées de minables bandes armées, plus dangereuses pour leur propre pays que l’ennemi lui-même… ».

Il dira qu’en plus de garantir et protéger les droits et devoirs des militaires, il dira que la justice militaire a une finalité d’aider le commandement à maintenir l’ordre et la discipline dans les rangs.

Il a précisé que les tribunaux militaires créés à Bamako, Kayes et Mopti, ont pour vocation à juger les infractions de droit commun commises par les militaires dans le service, les caserne, quartiers, dépôts, navires et aéronefs ou autres établissements militaires, en bivouac ou en stationnement et les infractions spécifiquement militaires, dans les ressorts judiciaires des Cour d’Appel de leur siège.

« Pour le jugement le Tribunal militaire comprend 5 Magistrats dont un Conseiller à la Cour d’Appel de Bamako, qui préside les débats et 4 Juges militaires, assistés d’un Greffier et requiert la présence d’un Représentant du Ministère public, partie poursuivante », a-t-il ajouté.

Cependant, il dira qu’en dehors du pouvoir d’opportunité des poursuites, qui appartient au Ministre de la Défense et non au Procureur Militaire, les autres modalités de fonctionnement s’inspirent largement du Code de Procédure Pénale et des Textes organiques en matière judiciaire.

Et, pour donner le top départ, le Tribunal militaire de Bamako va juger l’affaire ministère public contre le Lieutenant-colonel Alkalifa Ag Amahi, accusé de désertion avec complot, abandon de poste en présence de bandes armées et de pillage de denrées avec bris de portes.

Assane Koné


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