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Droits de l’Homme au Mali : La FIDH et l’AMDH saluent des avancées, mais dénoncent des blocages

lundi 18 décembre 2017, par Assane Koné

Dans le cadre du lancement de leur rapport officiel 2017, intitulé « Face à la crise, faire le choix de la justice », l’Association malienne des droits de l’homme (AMDH) et la fédération internationale des ligues des droits l’homme (FIDH), ont organisé le vendredi 8 décembre 2017, une conférence de presse à la Maison de la presse. L’objectif est de faire l’état de la lutte contre l’impunité au Mali, faire le point sur plusieurs affaires judiciaires emblématiques et les avancées enregistrées au cours des derniers mois dans certains dossiers.

Cette rencontre avec les femmes et les hommes de média, animée par Me Moctar Mariko, Président de l’AMDH et Drissa Traoré, vice-président de la FIDH, a enregistré la présence de Mme Bintou Samaké, Présidente de WILDAF, de Issiaga Fofana, membre du bureau national de l’AMDH.

Le 7 décembre 2017, en amont de l’examen périodique universel du Mali devant les Nation Unies, la FIDH et l’AMDH ont publié un nouveau rapport, analysant les moyens et actions déployés par la justice du pays pour lutter contre les crimes les plus graves.

Revenant sur plusieurs affaires emblématiques, le rapport montre que certains dossiers ont connu des avancées significatives, grâce à la volonté et aux positions tenues par les autorités. D’autres sont toutefois restés en souffrance, entravés par une situation sécuritaire fragile, le manque de moyens, ou parce que politiquement sensibles.

Pour lutter efficacement contre le terrorisme et l’insécurité, la FIDH et l’AMADH ont lancé un appel à l’endroit des autorités maliennes et les forces internationales à mettre la justice, le dialogue et le respect des droits humains au cœur de leurs actions. Et d’éviter ainsi de renouer avec les erreurs passées des stratégies du tout sécuritaire.

« L’ampleur et la gravité des crimes en cours d’instruction ou de jugement sont inédites dans l’histoire contemporaine du pays. Pour dire que nos organisations ont entendu plus de 500 victimes et témoins ces dernières années », a indiqué Me Mariko. Avant d’ajouter qu’elles ont initié ou participé à une dizaine de procédures judiciaires, accompagnant plus de 180 parties civiles devant la justice. Ce rapport revient sur l’Etat d’avancement de plusieurs affaires en relations avec des crimes graves.

Il a indiqué que les 12 derniers mois ont permis des avancées considérables, avec l’ouverture du procès de l’ex Président putschiste, Amadou Haya Sanogo et de ses complices, poursuivis pour l’exécution sommaire de plus de 20 bérets rouges et la condamnation par la justice malienne de l’ancien commissaire de la police Islamique de Gao, Aliou Mahamane Touré. Par ailleurs, un pôle judiciaire spécialisé dans la lutte contre le terrorisme et une commission vérité, justice et réconciliation ont été créés puis sont entrés en fonction en 2015.

« Ces derniers mois, nous avons peut-être plus obtenus par la justice que ce qui fut obtenu par les armes : la reconnaissance des crimes des putschistes et des groupes armés », a indiqué Moctar Mariko, président de l’AMDH. Il a déclaré que la paix se gagnera autant par le rétablissement de la sécurité qu’en répondant aux besoins de vérité, de justice et de réconciliation.

Pour dire aussi qu’on ne peut pas aller à la réconciliation sans un minimum de la justice. Il a souhaité que ce rapport soit lu par les autorités et qu’ils comprennent la préoccupation des maliens. La FIDH et l’AMDH recommandent aux autorités maliennes de reconsidérer les plaintes qui ont été déposées, de faire en sorte que la réconciliation politique ne puisse pas prendre le pas sur la justice. Car il n’y a pas de réconciliation sans un minimum de justice.

Toutefois, le rapport décrit aussi comment d’autres affaires n’ont pas pu faire l’objet de procès. Comme les crimes sexuels perpétrés de manière systématique par les groupes djihadistes au Nord-Mali en 2012-2013. « Si des mandats d’arrêt ont été déposés et des dizaines de personnes arrêtées et inculpées en 2013, aucune n’a depuis été inquiétée », a-t-il dénoncé. Alors que ces crimes sont constitutifs de crimes de guerre et contre l’humanité.

Le rapport plaide aussi pour que les enquêtes anti terroristes puissent inclure les graves violations des droits humains commises contre les populations.

« Le contexte sécuritaire et politique ambivalent continue à peser sur les procédures judiciaires », a-t-il regretté. Ainsi, l’intensification des violences et attaques ont eu des conséquences négatives. Pour être plus claire, il dira qu’elle empêche le retour d’un système judiciaire fonctionnel dans le nord et le centre du Mali et pousse l’Etat à concentrer ses moyens sur les réponses sécuritaires et militaires. Par ailleurs, les accords passés pour obtenir la résolution politique du conflit ou la libération d’otage ont entrainé la libération ou l’abandon des poursuites à l’encontre d’individus soupçonnés de crimes graves.

« Quant au procès de Haya Sanogo, il n’a toujours pas repris, un an jour pour jour après sa suspension pour vice de procédure dans la conduite des expertises médico-légales », a-t-il dénoncé.

Ils ont ajouté que si l’accord de paix de juin 2015 consacre le caractère imprescriptible des crimes de guerre contre l’humanité, et la non amnistie pour leurs auteurs, sa mise en œuvre reste au point mort.

« Si la lutte contre l’impunité n’est pas la seule réponse à apporter au conflit, il ne pourra y avoir de paix sans un minimum de justice. Les maliens attendent de leurs justice qu’elle règle les différends, les protège de l’arbitraire des hommes en armes et contribue ainsi à sortir leur pays de la crise qu’ils endurent depuis 2012 », a déclaré Drissa Traoré, vice-président de FIDH.

Bintou COULIBALY


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