Culture > Biennale africaine de la photographie : Ségou découvre en « OFF » les photos de « Foto Ton »

Biennale africaine de la photographie : Ségou découvre en « OFF » les photos de « Foto Ton »
mardi 10 novembre 2015, par
Pour la 1re fois depuis 20 ans, Ségou abrite la première exposition en « OFF » dans une capitale régionale, dans le cadre de la Biennale africaine de la photographie. Le 7 novembre 2015, la capitale des 4 444 balazans, a enregistré une animation particulière.
Sous l’égide de la Fondation du Festival sur le Niger, Ségou abrite 2 expositions de photographies de très belle facture. Vu la qualité des images exposées, il n’y a aucun doute les salles d’exposition de la Fondation du Festival sur le Niger qui abritent les 2 expositions, seront des points d’attraction de la capitale de la 4e région.
Les ségouviens qui ont fait le déplacement ne s’imaginaient pas de la surprise qui les y attendait, lorsque le Préfet de Ségou, accompagné du Maire de la ville et de Mamou Daffé, Président de la Fondation du Festival sur le Niger, a coupé le ruban symbolique d’inauguration des expositions.
« Dans le cadre des Rencontres de Bamako, dont le thème est cette année ‘’Telling Time’’ ou conter le temps, avec le soutien de la Fondation du Festival sur le Niger, pour ne pas dire celle de Mamou Daffé, l’Association des photos journalistes-artistes au Mali (APAM) a décidé de faire une exposition en ‘’OFF ‘’ à Ségou, sous le thème de ‘’ Kobê nan wati’’ ou chaque chose à son temps », c’est en ces termes que Amadou Keita, Président de l’association « Photo ton » a introduit ses propos. Il a indiqué que les images exposées à Ségou sont un pan de leurs travaux photographiques sur l’actualité, la création artistique contemporaine et dans des studios. « Cette exposition traduit une certaine réalité de la vie d’aujourd’hui que seuls les objectifs des photographes arrivent à capter. Nos images traduisent les changements dans notre société », a-t-il déclaré.
Des images où l’amour côtoie des dégâts de la guerre
Si des travaux photographiques de Malick Sidibé, avaient déjà scruté la vie amoureuse des jeunes de Bamako de 1960 à 1970, les photos de Zoumana Traoré exposées à Ségou, dans la même thématique, nous invite à voir le type d’images que des jeunes hommes et des jeunes filles prennent aujourd’hui dans l’intimité d’un studio, où seul l’objectif du photographe est témoin.
A côté des photographies de Zoumana Traoré qui magnifient l’amour et la tendresse que des être humains se portent mutuellement, le Commissaire de l’exposition nous invite à voir ce qui peut arriver quand la rancœur, la méchanceté gratuite et la violence s’installent dans les cœurs à la place de l’amour et de la tendresse.
A travers les photographies de Boubacar Issa cissé, le Commissaire de l’exposition « Kobê na waati », invite à revisiter le marché Washington de Gao, tout juste après les bombardements français dans le cadre de la reprise de la ville dans la main des Djihadistes. On se souvient, comme à l’époque des barbares en Europe, des individus, souvent sous l’effet de drogues, ont envahi les régions au nord du Mali. Selon eux, cela entrait dans le cadre d’une ultime action de ré-islamiser le Mali déjà musulman depuis des millénaires.
Et, comme il faut un peu de tout pour faire un monde. Fort heureusement, le Commissaire a eu la merveilleuse idée d’effacer aussitôt dans les esprits, le désastre du marché Washington de Gao. Pour se faire, il offre au public du Tiécoura Dao. Ce jeune artiste malien plein de talents fait partie des meilleurs de sa génération dans le monde dans la vidéo d’art. Mais à Ségou, il est arrivé avec une exposition de photographies riche en couleurs. Il y expose un pan de son riche travail photographique sur les bazins dans les ateliers des teinturières de Bamako. Ce photographe talentueux, invite à voir les tableaux exceptionnels que l’on peut apercevoir dans des ruelles de Bamako, si on y prête attention. Des bazin colorés et bien amidonnés qui attendent, exposés sur des files que le soleil face son effet, pour ensuite passer sous les frappes du « fanigossila ». Que de belles images.
Décidément, comme la plupart des maliens, le Commissaire de l’exposition a été terriblement marquée par la crise qu’a vécu le Mali. Il n’arrive pas à s’en éloigner. Immédiatement, après les belles couleurs de Tiécoura Dao, il nous invite à voir un pan de ce que le photographe Amadou Keita a ramené dans sa besace après un séjour dans les régions nord du Mali, pendant les opérations militaire de la libération. Amadou Keita, dont le talent n’attend aujourd’hui qu’une reconnaissance internationale, dans un travail photographique d’une rareté exceptionnelle, fait revivre les heures difficiles de la conquête de Konna, ville occupée momentanément par les Djihadistes qui voulaient progresser sur Mopti. A Konna, l’objectif d’Amadou Keita, n’a capté que les dégâts portés sur les infrastructures administratives : la Sous-préfecture. Décidément, les symboles de l’Etat ont payé le plus grand tribut dans cette crise insensée. « J’ai voulu montrer comment, la crise a porté un coup dur aux infrastructures administratives », a-t-il déclaré.
Aussi, de plus en plus connu au Mali comme un adepte de la création photographique d’art contemporain, Amadou Keita, ne pouvait passer par Ségou, sans dire ce qu’il entend par cette approche photographique. Et, la meilleure manière de le dire, c’est de montrer ce qu’il fait. Et, c’est ce qu’il a fait, en exposant des images où il balade son objectif dans les poubelles pour y trouver une beauté. « Vous le voyez des objets usagers qui sont à la poubelle, ont toujours un attrait certain », a-t-il indiqué. Effectivement, présenté comme tel, une poubelle peut être belle et contenir même la beauté.
Aussi, en photo journaliste confirmé, Amadou keita, dans une série intitulée « Nomades d’Essakane », qui porte sur des photographies réalisées en 2007 et en 2010, lors de différentes éditions du Festival au désert, traduit l’union qui existait entre les communautés maliennes du nord avant la crise. « C’était la belle époque », a-t-il indiqué.
En conformité avec le titre de l’exposition, Bintou Camara, une dame qui compte dans la photographie malienne, attire l’attention, sur la présence chinoise en Afrique. Depuis le Tchad, son objectif scrute l’univers des chinois qui n’ont plus de complexe à intervenir dans le développement du continent.
Et pour finir, le commissaire de l’exposition a fait le choix de montrer les différences dans la similitude, en juxtaposant les travaux de deux photographes de deux époques différentes. La série « Copain copine » de Mbarakou Touré qui montre des photographies de 1960-1970, côtoie la série « Copain copine » de Boubacar Issa Cissé, des réalisations actuelles.
Assane Koné