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JCC : Un panel s’interroge sur l’avenir du 1er festival de cinéma du continent

mardi 8 septembre 2020, par Assane Koné

En principe, la 31e édition des Journées Cinématographiques de Carthage aura lieu du 7 au 12 Novembre 2020, à Tunis. En prélude à cet évènement cinématographique de premier ordre et eu égard au contexte de la pandémie de la COVID-19, une Journée d’étude placée sous le thème « Les JCC ‘’Hier, Aujourd’hui et Demain’’ » a eu lieu le samedi 5 septembre 2020. Dans le cadre de cette Journée d’étude, le Centre des Musiques Arabes et Méditerranéennes « Ennejma Ezzahra » à Sidi Bou Said, a abrité les travaux du panel n°4 qui a traité du thème : « Le devenir des JCC ». Lissez la correspondance particulière sur cet évènement !

« Ce panel est une opportunité de constat et une tentative de restructuration de ce festival qui s’organise cette année dans des circonstances exceptionnelles. Le choix de ceux qui y travaillent est de ne pas le reporter mais de choisir les films qui ont marqué toute son histoire depuis sa création en 1966. L’objectif de ce forum est de redéfinir plusieurs de ses aspects et de proposer des suggestions et de pouvoir archiver ce forum afin qu’on ne soit pas toujours dans une optique d’improvisation », a déclaré Ridha Behi, DG des JCC lors de l’ouverture de la journée d’étude. Le 4e panel intitulé « Le devenir des JCC » s’est déroulé en la présence de professionnels du cinéma tel que Sonia Chamkhi, Abdelatif Ben Ammar, Hamid Bouabid, de critiques, d’experts en droit et en finances, représentants des associations et structures partenaires des JCC. Rappelons que les travaux des trois panels précédents ce sont étalés et qui vont déboucher sur un colloque qui se déroulera le 8 novembre pendant la prochaine édition des JCC.

Le Ministre des affaires culturelles Walid Zidi était présent à cette journée d’étude et a déclaré « Nous sommes là afin de développer le paysage culturel, notre objectif est commun, celui d’investir culturellement l’enfant vulnérable. Chaque artiste est le conseiller du ministre afin de produire, créer et de rendre justice à cet enfant. » Le ministre des affaires culturelles a demandé à recevoir les propositions et les conclusions de ce forum afin de participer à la concrétisation tout en préservant la liberté de création.

Mr Kamel Ben Ouanès responsable du forum a présenté les objectifs du 4e panel qui devaient permettre de réfléchir sur le devenir des JCC tout au long de cette journée d’étude. Le 4e panel s’est articulé sur trois séances :

  Quel cadre juridique pour les JCC ?
  Pour un nouveau dispositif de partenariat
  La culture cinématographique et le devenir des JCC

La première séance s’est déroulée en la présence de Mme Hana Ben Abda enseignante universitaire en droit et experte auprès des organismes, Mr Ramzi Jebabli, avocat et producteur ainsi que Mr Ramses Mahfoudh, producteur et représentant du syndicat des producteurs. Les trois sont d’accord qu’un cadre juridique est plus que primordial pour que les JCC continuent à rayonner, et acquérir leur indépendance morale et financière, garder sa pérennité et que les JCC puissent trouver d’autres moyens de financement.

Hana Ben Abda a commencé son intervention par une métaphore pour dire que les JCC sont tel un corps sans âme en l’absence d’un cadre juridique d’où la nécessité de créer un cadre juridique permettant de préserver la création et qui permettrait de structurer le festival. Elle a proposé la mise en place d’une société tout en expliquant que dans les lois tunisiennes nous n’avons pas le terme « fondation » certes mais que dans la pratique il n’y a rien qui empêcherait sa création se basant sur le cadre juridique des associations. La loi permet qu’une association prenne la gestion d’une société. Dans ce cadre elle a proposé que le chef de gouvernement aurait la possibilité de faire des JCC un établissement public ou de lui conférer une nature associative.

Ramzi Jebabli a souligné l’importance de garder la ligne éditoriale des JCC et a posé un diagnostic sur les quatre problématiques des JCC à savoir, la pérennité, la démocratisation des décisions, le financement ainsi que la centralisation. Sur la question de la structuration, il propose de créer un réseautage entre les différentes associations cinématographiques, les JCC ainsi que des institutions publiques et privées qui s’articulent autour d’une société commerciale comportant un conseil scientifique qui permettrait aux JCC une indépendance financière et morale.

Ramses Mahfoudh est intervenu au nom du syndicat des producteurs en soulignant l’avis des experts et en proposant d’inscrire les JCC en tant propriété intellectuelle et une marque déposée dans le cadre d’une structuration qui garantirait l’indépendance du festival. En ajoutant qu’il faut distinguer entre la gestion et la création pour espérer la continuité du rayonnement des JCC à l’échelle internationale.

L’absence d’un cadre juridique et d’une structuration qui organisent les JCC, sous la forme d’association ou d’une société, a été le sujet d’un débat intéressant.

Ridha Najjar, expert en communication, est intervenu pour proposer une forme associative aux JCC, puisque cette forme permet plus de souplesse dans la gestion financière d’une part et d’autre part le cadre associatif permet la dissociation entre le comité exécutif et le conseil consultatif. Il a aussi ajouté qu’il est primordial d’avoir une équipe permanente qui travaille tout au long de l’année pour espérer une productivité. Il a ajouté la nécessité de prendre en considération les nouveaux formats de consommation, les changements d’horaires et de public surtout que cette transformation est fondamentale.

La seconde séance fut enrichie par Mr Hakim Ben Hamouda, économiste, écrivain et ancien Ministre des Finances ainsi que Mr Mourad Sakli, consultant en ingénierie culturelle, représentant d’Altissimo consulting et ancien Ministre des affaires culturelles.

Mr Hakim Ben Hamouda a commencé par exposer l’importance du cinéma, qui étant jeune, il a appris grâce au cinéma l’art du débat et de la liberté. Il a souligné l’importance du cinéma qui est selon lui plus important que l’Histoire écrite dans les manuels. Il a continué son intervention par définir cette manifestation comme étant à l’origine d’une affirmation civile et citoyenne. Selon lui, il faudrait maintenir cette identité et développer les relations tout en tenant compte de la mondialisation, il est nécessaire d’avoir une autonomie de gestion afin de commercialiser le festival. Un festival devrait pouvoir vivre de ses produits que ce soit pour les JCC ou pour tout autre grande manifestation dans le pays. Il a souligné que l’avenir des JCC est telle une âme qu’il ne faudrait pas y toucher. Du coté administratif, il a prôné la privatisation du festival tout en gardant la place de l’État afin de garantir la transparence et la création. La décision de la privatisation a besoin d’un ministre qui oserait prendre ce parti pris.

Mr Mourad Sakli a commencé son intervention par le fait qu’on devrait définir le nouveau positionnement des JCC. Dans cette optique le reste sera facile à définir. Le nouveau positionnement devrait se faire par rapport à la nouvelle politique des JCC. Pour pérenniser les JCC nous devons réfléchir à une politique de développement tout en préservant les acquis tel que le public des JCC. « Le positionnement va nous donner tout un cadre logique qui va nous guider et nous faciliter la recherche de partenariat. ». D’après lui on doit optimiser ce qui existe c’est à dire le public qui est toujours au rendez-vous et capitaliser sur cet acquis inestimable. Il a souligné la nécessité d’organiser ce festival tout au long de l’année afin de connaitre nos besoins en partenaires. Il a proposé de faire des petits partenariats avec de petites structures et les fidéliser avant d’accéder aux grands mécènes et sponsors. D’après lui nous ne devons pas attendre le changement du cadre juridique mais se questionner sur comment optimiser les acquis ainsi que les outputs du forum afin de faire évoluer le festival.

La troisième séance s’est déroulée avec les interventions de Mr Ghazi Ghrairi, juriste de renom et ambassadeur de Tunisie auprès de l’UNESCO, Mr Taher Chikhaoui, universitaire et critique de cinéma et Mr Ibrahim Letaief, réalisateur, directeur artistique de la 31e édition des JCC et ancien directeur des JCC (2015 et 2016). Ghazi Ghrairi a souligné la nécessité d’une structure des JCC et l’importance de l’inclure dans le patrimoine vivant et de le défendre auprès de l’UNESCO. Il a appelé dans son intervention à capitaliser sur l’indépendance des JCC et de prendre en considération ce que les fondateurs ont mis comme objectif tout en respectant les besoins des générations futures. Il est important de trouver un réseau associatif où les JCC seraient un élément important afin de préserver ce festival. « Les JCC font partie de l’identité nationale moderne ».

Taher Chikhaoui a insisté sur l’importance de l’épanouissement du cinéma tunisien afin d’espérer un rayonnement mondial. Il est aussi important de créer une dynamique de réflexion grâce aux professionnels du cinéma sur l’avenir des JCC pour qu’elles ne soient pas réduites à un évènement ponctuel. Il a rappelé que le désir du cinéma, la cinéphilie ont précédé la production. Le désir de cinéma impressionne toujours les observateurs et les critiques parce qu’on voit rarement un festival avec autant de ferveur et un tel public. Il faut donc articuler le festival avec la vie cinématographique. Faire le festival avec tous les acteurs de la profession : cinéastes, producteurs, distributeurs et exploitants… mais aussi dont la passion et leur travail s’articulent autour du cinéma qui ne sont pas forcément les mêmes personnes. Il propose un comité qui doit continuer à réfléchir et construire un discours pour bien envisager l’évolution du festival.

Ibrahim Letaief a commencé par souligner que l’identité du festival est arabo-africaine mais qu’il reste ouvert à d’autres pays. Le festival est un espace d’expression de plusieurs cinéastes et une opportunité de rencontre et d’échange. Il a souligné qu’un cadre juridique est important afin de garantir sa continuité et sa transparence. Il propose de constituer un comité sans les personnes qui organisent les JCC afin de continuer à réfléchir sur le devenir des JCC.
La question des archives est primordiale d’où le choix de travailler cette édition sur les archives, la collecte, la numérisation de plusieurs documents et plusieurs collections privées. Les JCC doivent continuer à rayonner dans les institutions scolaires et la diplomatie culturelle


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