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Bah N’Daw : « Nous recevons avec honneur l’euro symbolique… »

mardi 6 avril 2021, par Assane Koné

« Nous acceptons avec honneur cette remise de l’euro symbolique en réparation du préjudice subi par le Mali et par l’humanité suite à la destruction des mausolées de Tombouctou ». C’est par cette déclaration pleine d’émotion que le Colonel à la retraite Bah N’daw, Président de la Transition, Chef de l’Etat du Mali, a résumé son intervention lors de la cérémonie de remise de l’euro symbolique au Mali et à la communauté internationale.

Dans le but de réparations symbolique du préjudice subi par les victimes du crime de guerre commis par Ahmad Al Faqi Al Mahdi à Tombouctou en 2012, le Fonds au profit des victimes de la Cour pénale internationale, a organisé le 30 mars 2021, une cérémonie pour marquer les esprits. Mme Doumbia Mama Koité, Présidente du Conseil de direction du Fonds au profit des victimes, a remis de façon symbolique un euro symbolique au Mali et à la Communauté internationale, en guise de réparation.

L’euro symbolique du Mali a été remis à Bah N’daw, Président de la Transition, Chef de l’Etat et le Directeur général adjoint de l’UNESCO a reçu l’euro symbolique pour le compte de la communauté internationale.

« Cette remise symbolique va soulager les cœurs des maliens qui ont subi un choc à la vue de la destruction des mausolées de Tombouctou en 2012 », a déclaré Mme le Maire de la commune III du District de Bamako, dans son mot de bienvenue.

En sa qualité de Procureure de la CPI, Fatou Benssouda a rappelé l’importance historique du patrimoine, avant de dire que le patrimoine au Mali est d’une importance capitale, parce que berceau de trois grands empires. Selon elle, en plus d’être une terre de diversité culturelle exceptionnelle, le Mali est le pays de la charte du Manding élaborée en 1236 et considérée comme l’ancêtre des instruments juridiques internationaux de protection des droits de l’homme.

« En 2012, à la faveur de la crise du nord, ce patrimoine a été attaqué de façon violente à Tombouctou, par la destruction des mausolées », a-t-elle déclaré. Avant d’ajouter qu’en le faisant, ces auteurs ont commis un crime qui ne pouvait pas rester impuni.

« Sensibiliser l’opinion nationale et internationale sur l’importance de protéger le patrimoine culturel »

Fatou Benssouda a rappelé que les juges de la CPI ont considéré que « les biens culturels ainsi que le patrimoine culturel sont uniques et revêtent une valeur sentimentale. (….). La destruction du patrimoine culturel international est donc porteuse d’un message de terreur et d’impuissance ; elle détruit une partie de la mémoire partagée et de la conscience collective de l’humanité ; et elle empêche l’humanité de transmettre ses valeurs et ses connaissances aux générations futures. C’est une perte irremplaçable et une négation de l’humanité ».

Ainsi, au-delà de l’euro symbolique remis aux autorités maliennes et à l’UNESCO, Fatou Benssouda dira que la cérémonie est l’occasion de reconnaître que la destruction de tels monuments affecte non seulement les communautés les plus proches, mais aussi l’humanité dans son ensemble et la communauté nationale et de sensibiliser l’opinion nationale et internationale sur l’importance de protéger le patrimoine culturel pour assurer la continuité culturelle et promouvoir la paix et le développement durable.

Fatou Benssouda amis un accent particulier sur le fait que cette cérémonie, première du genre, est historique et illustre l’importance de la réparation dans la reconstruction des sociétés qui ont subi des violences. « L’impunité n’est pas une option », a-t-elle déclaré. Avant de dire merci à l’Afrique pour tout le soutien dont elle a bénéficié à son poste de procureure de la CPI.

Au nom des victimes, Harber Kounta, venu de Tombouctou, s’est exprimé sur le ressenti des populations de la ville aux 333 saints. Selon lui, les mausolées de Tombouctou n’ont pas qu’une dimension religieuse, mais elles traduisent la cohésion nationale malienne. « Les 333 saints de Tombouctou sont issus de toutes les communautés du Mali et à cet effet, ils symbolisent l’unité profonde de notre pays », a-t-il déclaré.

Pour le compte du Fonds au profit des victimes, Mme Doumbia Mama Koité, a rappelé qu’à la suite de la condamnation de Ahmad Al Faqi Al Mahdi, le 17 avril 2017, les juges de la Cour pénale internationale ont prononcé une ordonnance de réparation, décision dans laquelle ils ont identifié les préjudices que ce crime de guerre avait causé à la population de Tombouctou, les mesures appropriées pour les réparer et le montant nécessaire à leur réalisation

Elle dira que selon les juges, ce crime de guerre a causé des torts et souffrances à trois groupes de personnes : les descendants et descendantes des saints enterrés dans les mausolées ainsi que les maçons et gardiens ; la communauté de Tombouctou dans son ensemble, c’est-à-dire tous les habitants de Tombouctou et les personnes déplacées ; la communauté malienne et la communauté internationale dans leur ensemble.

Pour ce qui concerne les descendants et descendantes des saints enterrés dans les mausolées ainsi que les maçons et gardiens, elle a annoncé que la CPI a estimé qu’ils ont subi un préjudice particulièrement élevé et qu’à ce titre ils ont droit à des réparations individuelles sous forme de compensation financière symbolique.

L’ordonnance de réparation a fixé la responsabilité d’Ahmad Al Faqi Mahdi aux fins de réparations à 1 775 000 000 FCFA

Pour ce qui concerne la communauté de Tombouctou dans son ensemble, c’est-à-dire tous les habitants de Tombouctou et les personnes déplacées, la CPI a estimé qu’ils ont subi des torts moraux et économiques. Et, au regard de la nature collective des préjudices, les juges ont décidé de mesures de réparations collectives. « Pour remédier au préjudice économique, les juges ont decide de la mise en œuvre de programmes d’activités génératrices de revenus à destination des personnes dont les revenus ont été affectés par la destruction », a-t-elle indiqué.

Enfin, s’agissant de la communauté malienne et de la communauté internationale dans leur ensemble, les juges ont considéré qu’elles avaient droit à une réparation symbolique en raison de la valeur inestimable et universelle des bâtiments détruits. « Spécifiquement, le juges ont ordonné la remise d’un euro symbolique aux autorités maliennes et à l’UNESCO », a-t-elle ajouté. Avant de préciser que l’ordonnance de réparation a fixé la responsabilité d’Ahmad Al Faqi Mahdi aux fins de réparations à 1 775 000 000 FCFA.

Mme Doumbia Mama Koité a rappelé que le Fonds en sa qualité d’organisme de la CPI chargé de la mise en œuvre des réparations et de levée des fonds nécessaires, a été chargé par l’ordonnance de réparation dans l’affaire Al Faqi Al Mahdi, de proposer un plan de mise en œuvre de réparation. « Après 18 mois de travail, de consultation des victimes, de collecte de demandes de réparations, le Fonds a débuté la mise en œuvre des réparations en janvier 2021 », a-t-elle précisé.
Pour sa part, le Directeur général adjoint de l’UNESCO, a indiqué que la cérémonie marque un jour d’hommage et de commémoration. Il a rappelé l’horreur subit en 2012, par la destruction des mausolées de Tombouctou. Il a ensuite fait un développement sur la nécessité et l’obligation de protéger les biens culturels pendant les conflits.

« Nous acceptons avec honneur cette remise de l’euro symbolique en réparation du préjudice subi par le Mali et par l’humanité suite à la destruction des mausolées de Tombouctou », a déclaré Bah N’daw, Chef de l’Etat. Il a estimé que la cérémonie est pleine de signification et témoigne d’un engagement commun contre l’impunité.

Assane Koné


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