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Médiation de la crise du Nord malien : Alger remplacera Ouaga

vendredi 17 janvier 2014, par Assane Koné

Exit donc la Cedeao et son médiateur attitré Blaise Compaoré ? Ce ne sera pas si cruellement ressenti. Alger, Mecque un moment mise à l’écart de la médiation des différentes crises qui ont secoué le nord malien à partir de 1990 revient en force. Mais, les sources proches du dossier précisent qu’Alger se chargera d’arrondir les angles avec Ouaga et tiendra Compaoré informé des progrès de sa médiation avec les groupes signataires de l’accord du 18 juin 2013. L’Etat malien aussi, sans doute, à en juger par les remerciements que, dans son message de nouvel an, le président Ibrahim Boubacar Kéita a adressés à son homologue pour ses efforts dans la résolution de la crise malienne. Comme pour passer l’éponge sur l’épisode de ce 25 octobre, en marge d’une réunion de la Cedeao, le président Keita dut recadrer Compaoré quand celui-ci osa parler « d’Azawad ». « Il n’y a pas d’Azawad, il n’y a que le Mali  » martela le Président malien.

Ce qu’Alger va faire

Le président Keita, on s’en souvient, tiendra quelques semaines plus tard, et dans la presse française des propos qui interpellaient la France taxée par Bamako de sympathie Pro-Mnla manifeste. En d’autre termes, de travailler à la partition du Mali. Alger reprend la main et est déjà au charbon. Premier acte de la négociation : une délégation du Mouvement Arabe de l’Azawad (Maa) vient de séjourner dans la capitale algérienne qui est aussi en contact avec le Haut Conseil Unifié de l’Azawad (Hcua) dont il est très familier de la direction. Transfuges de l’Ansardine d’Iyad Ag Ali, les principaux responsables du Hcua connaissent bien Alger qui les ont pratiqués tant durant la récente guerre du Nord que lors des rébellions précédentes. Reste le Mnla dont on dit qu’il n’a jamais été véritablement la tasse de thé des Algériens. Mais le mouvement du colonel Ag Nagim n’a pas de grandes libertés de manœuvre. « Paris est fatigué de ses enfantillages » croit savoir un proche du dossier alors que Ouaga tient à l’application de l’accord portant son nom et dont les signataires –Mnla, Hcua et autres groupes armés- reconnaissent l’intégrité territoriale du Mali et acceptent le cantonnement. Ce qui ne fut pas le cas jusque-là. Bamako avait d’ailleurs ironiquement rappelé que « c’étaient plutôt les forces maliennes qui étaient cantonnées ». Alger, maître d’œuvre du Pacte national de 1992 et de l’accord d’Alger de 2006 connaît la musique et surtout les musiciens. Il a mission de rallier les fauteurs de guerre à la paix. Le seul hic, pour certains observateurs, est qu’Alger fait plus partie du problème du Nord malien que de sa solution. Mais qui peut le plus peut le moins.

Réinsertion ?

Après la démobilisation, la réinsertion ? Le rapport de Ban ki Moon en date du 2 janvier rappelle que les groupes armés signataires de l’accord de Ouaga estiment leur effectif à 9088 combattants. La rue bamakoise ne pense pas une seconde que ces combattants seront une fois de plus intégrés à l’armée malienne. Le leadership malien aussi ne manquera pas de tirer les expériences des réinsertions passées. Rien ne dit alors que ces expériences seront rééditées. Alger fera ce qu’il pourra pour qu’un compromis soit trouvé. Mais pour notre source, c’est à la Minusma que sera refilé le lourd bébé. Or la Minusma n’a pas les meilleurs rapports avec le gouvernement malien qui l’a critiqué, il y a peu, sur l’affaire de Kidal où elle n’a pas pu maintenir l’ordre afin que l’avion du Premier ministre Oumar Tatam Ly puisse y atterrir. La semaine dernière, le chef de la Minusma a mis les points sur les i lors d’une conférence de presse. Sa hiérarchie le soutient manifestement ; à en juger par les compliments que lui adresse Ban Ki Moon dans son rapport du 2 janvier. Et puis, fait sans précédent, les ministres des 15 pays membres du Conseil de Sécurité seront à Bamako début février. Il est fort probable que la médiation propose que les troupes démobilisées soient utilisées dans une dynamique de sécurité collective comme «  gardes municipaux  » dans les régions Nord où elles seront en première ligne dans la bataille contre les groupes jihadistes. Ce sera à négocier. Et ce n’est pas gagné d’avance.

Adam Thiam
(LE REPUBLICAIN)

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