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MONSIEUR JEAN YVES LE DRIAN : Le proconsul du Nord-Mali

lundi 14 novembre 2016, par Assane Koné

La semaine passée, les Maliens qui suivent la presse parlée avaient tous entendu les propos de monsieur Jean Yves Le Drian, ministre français de la Défense sur Europe 1. Il a déclaré ceci : « C’est vrai qu’il y a aujourd’hui au Mali deux instabilités : il y a une instabilité sécuritaire au Nord du Mali et puis il y a aussi une nécessité de remédier à l’instabilité qui existe aujourd’hui dans cette région. Je répète régulièrement au président Ibrahim Boubacar Keïta qu’il faut prendre les initiatives nécessaires pour assurer l’intégration des peuples du Nord dans la communauté malienne. Je souhaite que cette mort nouvelle supplémentaire aboutisse à une prise de conscience ».
Voici des propos inacceptables pour un simple ministre français qui a eu l’outrecuidance pour s’adresser à un président d’un pays indépendant et souverain. C’est l’occasion de poser la question aux ténors du parti au pouvoir : Où se trouvent le député Moussa Timbiné, le secrétaire général Baber Ganot, le président du parti RPM, Dr BocaryTréta ? A ceux-ci, nous disons seulement que le parti RPM et celui qu’il a porté au pouvoir en septembre 2013 ne peuvent jamais égaler le parti US-RDA originel et son secrétaire général, le président Modibo Kéita.

Les propos du ministre français de la Défense doivent fâcher tout malien conscient en dehors de toute politique. Nous sommes des Maliens en dehors de toute question politique. Un ministre français insulte le Mali et les Maliens se taisent là-dessus. C’est une belle occasion au gouvernement du Mali, au parti au pouvoir et à toute la classe politique malienne d’adresser une réponse à la hauteur à ce petit « monsieur » français qui va jusqu’à dépasser la ligne rouge, en se permettant de donner une ligne de conduite à notre président. Ce petit « monsieur » français n’est ni du Sud, ni du Nord du Mali pour parler aux noms de ces deux communautés.

L’actuel président français et son premier ministre ne sont ni de la Corse et ni de l’Alsace Loraine. Ce sont des français qui dirigent leurs pays par le canal des urnes. Avec les déclarations de ce ministre français, M. Jean Yves Le Drian, c’est une belle occasion offerte aux dirigeants maliens de proclamer un autre 22 août 1960 et un autre 20 janvier 1961.

Si Madame Haoua Kéita, première femme député du Mali avait dit dans son livre intitulé, « Femmes d’Afrique », que « tous les Kéita, là où ils se trouvent sont les mêmes » ; nous avons compris ici par le sang. Mais est-ce qu’ils ont le même courage et la même intelligence ?

Si la voix du président Modibo Kéita a sonné le salut, le 22 août 1960, la voix du président Ibrahim Boubacar Keita doit sonner le salut, le 06 novembre 2016 (date de la déclaration de M. Yves Le Drian, selon l’AFP).

Les propos de ce ministre français confirment que notre pays est dirigé depuis Paris. En fait, cela revient à dire que les troupes occidentales et particulièrement celles de la France ne sont pas là pour la sécurité du Mali.

Malgré les moyens aériens sophistiqués en drones, en avions de surveillance, les groupes armés circulent comme bon leur semble au Mali. La dernière attaque contre la localité de Banamba, est une alerte donnée et qui montre que Bamako n’est pas à l’abri. Les mêmes erreurs de Nampala ont été reproduites à Banamba. Ensuite, les Maliens doivent revoir la situation des soldats qui abandonnent armes et bagages à l’ennemi.

Le défunt président congolais, Laurent Désiré Kabila, avait dit que « le petit Rwanda ne va jamais avaler le grand Congo ». Il avait commencé à exécuter tous les soldats fuyards devant les groupes armés.

L’autorité militaire doit décréter que tout soldat qui fuit en abandonnant les armes du pays à l’ennemi doit être passé par les armes et en premier, il doit creuser sa tombe là où il a pris la fuite. Les armes, les véhicules, les tenues et les épaulettes abandonnés par nos soldats à Gourma Rharous sont exposés sur le site de Malijet et nous Maliens, ça nous fait mal. Il vaut mieux fuir avec son arme que de la laisser à l’ennemi. Ceci démontre que c’est le Mali qui finance la rébellion. Les contribuables Maliens payent les armes à nos soldats et les mêmes armes sont abandonnées sur le terrain à l’ennemi.
Dans un article très intéressant, M. Georges Berghezan a dit clairement que la présence militaire française en Afrique est très contestée. Il dit ceci : "Cependant, ce changement s’est fait sans l’assentiment des principaux intéresses. Tout d’abord, le djihadisme n’est peut-être pas nécessairement perçu comme une menace immédiate par la majorité de la population, qui doit affronter d’autres sources, plus quotidiennes, d’insécurité. Par ailleurs, dans un pays qui a vécu la colonisation comme une humiliation, le retour de centaines de militaires français, après plus de trois décennies d’absence, et l’arrivée de soldats Etats-uniens ont profondément choqué de larges secteurs de l’opinion.

Cette partie substantielle de la population considère que cette présence est une atteinte à la souveraineté du pays, motivée par des intérêts qui ne sont pas ceux du Niger, et ne fait qu’attiser les crises qui secouent la région. L’intervention en Libye, où la France et les Etats-Unis ont tenu un rôle prépondérant, fait craindre au nombre de Nigériens que l’Occident nourrisse le chaos pour asseoir sa domination sur la région.
En outre, la situation toujours instable au Mali et la persistance de la menace de Boko Haram entretiennent des doutes sur l’efficacité de l’opération Barkhane et des moyens de surveillance et de renseignement déployés par les Etats-Unis. Depuis le lancement des programmes antiterroristes de ces derniers dans le Sahel, les groupes djihadistes n’ont cessé de se multiplier et de gagner en importance, tandis que le Niger n’avait connu aucune attaque de Boko Haram avant le début de Barkhane.

A moins de résultats rapides et concrets dans la lutte contre les mouvements djihadistes, cette méfiance persistera et risque d’entraîner des incidents dont feraient les frais les ressortissants occidentaux, civils et militaires, établis dans le pays. Si une grande partie de cette hostilité découle de la persistance de rapports inégaux entre le Sud et le Nord, notamment sur le champ de l’économie, certaines mesures d’ordre militaire pourraient être prises pour l’atténuer.

Par exemple, Paris devrait associer étroitement des militaires des États du G-5 Sahel au commandement de Barkhane et prouver qu’elle partage le renseignement collecté par ses agents et moyens d’observation. Elle devrait également fixer des échéances à cette opération, dont un programme de désengagement, y compris de ses bases « temporaires ». Les mêmes recommandations pourraient s’adresser également à Washington, qui devrait, dans un premier temps, également lever le voile opaque qui couvre l’étendue de ses moyens humains et matériels déployés au Niger".

Ce n’est rien qu’une forme de recolonisation. Et les propos de M. Yves Le Drian mettent directement en cause la sincérité de leurs amis au sein des groupes armés dont le MNLA. C’est Ansardine qui a revendiqué les différentes attaques contre les soldats français et maliens. Iyad Ag Ghaly et Amadou Kouffa ont été écartés des négociations par la France. Et pourtant, ils sont des Maliens. Ils ont aussi la réalité sur le terrain.

Aujourd’hui, tout le monde sait qu’il n’y a aucune administration à Dialloubé qui est à 60 kms de Mopti. Amadou Kouffa et Iyad Ag Ghaly n’ont jamais mis le Mali en cause. Ils ont parlé d’application de la Charia islamique au Mali et les Maliens sont à 95% musulmans, en tout cas sur le papier. Mais, il faut discuter avec eux car ils ont la réalité sur le terrain et ce sont aussi des Maliens.

Le président IBK le sait bien que son ami Mahamadou Djéri Maïga du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) ne représente rien sur le terrain. Les Français qui ont créé le MNLA aussi le savent. Quand la France à travers son satellite de l’ONU nous impose une ligne de conduite, c’est un diktat et une ingérence dans les affaires intérieures du Mali indépendant et souverain. Il n’y a aucune idée de paix dans la tête des dirigeants français au Mali. Ils sont venus dans notre pays pour le diviser et s’éterniser.

L’opposition malienne, si elle est sincère dans sa lutte pour le peuple malien doit dénoncer l’attitude française au Mali. Le peuple malien aussi ne doit pas rester les bras croisés. Les Nigériens ont toujours dénoncé la présence des soldats occidentaux sur leur sol. Et les nouveaux propos de M. Yves Le Drian au président IBK sont les mêmes qu’il avait prononcés avant, c’est-à-dire, le 16/12/2014, quant à la question posée à lui par Jeune Afrique : « La situation à Kidal vous inquiète-t-elle ? ».

Réponse : « C’est un abcès de fixation. Il faut le dédramatiser. Combien y a-t-il d’habitants à Kidal ? Trente mille, sur 17 millions au Mali ».

Le peuple du Mali, debout pour dire la vérité à la France et à ses satellites occidentaux. « Il vaut mieux mourir debout que de mourir coucher », a dit le proverbe.

Il faut dénoncer le diktat français. Pour la paix, il faut discuter avec tous les fils du Mali.

Vive la paix.
Yacouba Aliou


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